Le témoignage de son accident en mer
"Au mois d’août, je me trouvais en scooter des mers entre les deux bancs de sable à l’entrée du Bassin d’Arcachon. Il s’agissait d’une machine puissante, donc très lourde. Bien que me tenant à distance respectable des turbulences provoquées par des brisants marqués et cassants, une vague plus forte que les autres m’a renversé et la machine s’est retournée, coque en l’air. J’étais vêtu d’une combinaison complète qui m’a protégé du froid. Mon premier réflexe a été de m’assurer que le capot du coffre avant était bien fermé, auquel cas, s’il ne l’avait pas été, mon sac étanche contenant mes effets personnels et surtout mon smartphone aurait coulé, ce qui aurait considérablement compliqué la suite. Remettre le scooter dans le bon sens fut loin d’être évident car la coque est lisse, glissante, sans aucune prise, a fortiori quand l’on n’a pas pied, car on ne peut atteindre le rebord opposé. La seule prise possible était la grille d’entrée d’eau de la turbine. Mais encore fallait-il que je ne me piège pas moi-même… En effet, si mes doigts étaient restés coincés dans la grille au moment du retournement de l’engin, je pouvais me noyer.
Une fois l’engin redressé je suis remonté dessus mais, impossible de redémarrer le moteur. Pourquoi ? Car, comme je l’ai appris par la suite, je l’avais retourné dans le mauvais sens. Entre temps, le courant m’avait rapproché d’une zone très turbulente, j’avais donc peu de temps pour me signaler. J’ai immédiatement ouvert le capot, saisi mon smartphone et appelé le CROSS dont j’avais préalablement enregistré le numéro. J’ai donné ma position, décrit ma situation et précisé mon numéro de téléphone, car il était « masqué ».
L’hélicoptère de la sécurité civile est arrivé seulement 20 minutes après l’appel. Le pilote est resté cinq minutes en vol stationnaire au-dessus de moi, pour évaluer la criticité de ma situation et me faire faire quelques tests cognitifs. Puis, me voyant dériver vers une zone moins dangereuse, ce qui évacuait la nécessité d’un hélitreuillage et permettait de « sauver » l’engin, il m’a annoncé l’arrivée des secours. Un semi-rigide de la Gendarmerie est arrivé assez vite, m’a pris à bord et remorqué le scooter. Relevé d’identité et bilan cognitif à nouveau. Confié ensuite au bateau de la station SNSM d’Arcachon, j’ai été ramené au port, avec la machine en remorque. Pendant le trajet, j’ai pu apprécier la gentillesse, la compétence et le professionnalisme de mes sauveteurs, sans oublier l’impression rassurante laissée par le caractère « indestructible » de leur bateau. Avant cette péripétie, je pouvais me targuer d’avoir navigué cinquante ans dans cette région, sur tout ce qui flotte, et par tous les temps, sans le moindre accroc… Cela démontre, s’il en était besoin, que personne n’est à l’abri des éléments en mer.
Des bons souvenirs demeurent quand même, comme le réconfort apporté par les bénévoles de la SNSM à bord de leur bateau, avec des anecdotes utiles sur d’autres exemples auxquels ils avaient été confrontés. C’est à cet instant d’ailleurs que j’ai décidé d’aider cette magnifique institution, au-delà de ma trop modeste cotisation annuelle."
Bruno.
Ses enseignements et les conseils à donner
- Ne jamais partir en mer avec un numéro masqué sur son mobile.
- Enregistrer le numéro du CROSS, le 196, avec un intitulé immédiatement identifiable dans son répertoire téléphonique, car le stress diminue largement les capacités de réflexion et que chaque minute compte.
- Charger sur son smartphone une application GPS pour pouvoir signaler sa position précise au CROSS.
- Pour ceux qui portent des lunettes de vue, les avoir toujours à portée de main. Pour cela, utiliser une pochette avec un velcro autour de l’avant-bras.
- Ne pas partir seul en scooter des mers lorsque les conditions sont extrêmes.
- Votre binôme pourra vous assister, ou a minima alerter les secours.
- Porter systématiquement une combinaison intégrale en cas d’évolution au large. L’eau y est plus froide et, le temps passant, la sensation de froid est accrue par le stress.
- Disposer toujours d’une VHF portable et étanche. Non seulement, cela permet l’accès direct au canal 16, mais il faut aussi considérer que les zones de réception des mobiles s’amenuisent considérablement au large. Prendre soin de la recharger à bloc avant chaque sortie. Un sac à dos léger en toile de voile convient bien pour la stocker et n’entrave pas les évolutions.
- Toujours connaitre impérativement le (bon) sens de retournement de la machine avant toute utilisation, quand cela est le cas, pour pouvoir repartir sans « noyer » le moteur. L’information est située sur un sticker à l’arrière de la machine à côté de la sortie de la turbine. Elle devrait aussi figurer sur la planche de bord.
Nos bénévoles sont entraînés et équipés pour effectuer ce type de sauvetage. Grâce à votre soutien, vous les aidez à être présents la prochaine fois !
Article paru dans le Magazine Sauvetage n° 139 (1er trimestre 2017).