Un canotier-médecin au grand cœur

A terre, cardio­logue, Charles Hudelo sauve des vies. En mer, cano­tier à la station de Dunkerque, il porte secours aux naufra­gés. Il préside aussi la commis­sion médi­cale de la SNSM. Portrait.

À l’image des gens du nord, Charles Hudelo est un homme de cœur. Mais mieux encore, il  reven­dique au natu­rel un atta­che­ment quasi viscé­ral à sa région. « Je suis fier d’être Dunkerquois, dit-il, avant d’ajou­ter qu’il ne connaît rien de plus fasci­nant qu’une tempête en hiver, face au Pas-de-Calais ». C’est pour la mer ; pour la tutoyer au quoti­dien qu’il a refusé au terme de ses études de méde­cine passées à Tours, une allé­chante oppor­tu­nité profes­sion­nelle. Et c’est toujours pour elle, pour embras­ser l’ho­ri­zon chaque matin à son réveil, qu’il a choisi d’ha­bi­ter Malo-les-Bains, la zone rési­den­tielle de la ville de Dunkerque. Il est vrai que « ce besoin de mer » qu’il partage avec son épouse Valé­rie est ancré dans ses gènes. Il relève d’une tradi­tion fami­liale où tout gamin, après ses premiers pas en Opti­mist à l’école de voile de Bray-Dunes, son père l’em­me­nait tirer des bords sur le Vaurien qu’il préserve jalou­se­ment dans la maison de ses parents.

La tradi­tion, c’est encore elle qui justi­fie l’en­ga­ge­ment de Charles pour de longues études de méde­cine qui l’ont mené depuis une bonne décen­nie à exer­cer la profes­sion de cardio­logue. « Avec un grand-père méde­cin, un père méde­cin, j’étais vrai­ment condi­tionné », confie-t-il. Aujour­d’hui, c’est avec le Kobby, un petit boîtier d’alerte qui l’aver­tit des inter­ven­tions, qu’il consulte. Toujours prêt à embarquer sur le SNS 5911 Jean-Paul Legars, le semi-rigide de la station de Dunkerque ou sur le canot tous temps Jean Bart II. C’est une évidence. Depuis sa jeunesse, l’at­ta­che­ment de Charles pour la SNSM ne s’est jamais terni. « À 19 ans j’étais déjà cano­tier sur le canot de la station SNSM de Bray Dunes. À 47 ans, je suis  Toujours cano­tier à Dunkerque. Et je tiens à y rester, confirme-t-il, même si je porte une triple casquette, celle de marin, de méde­cin réfé­rent pour le Nord-Pas-de-Calais et de Président de la Commis­sion Médi­cale de la SNSM ». Une assem­blée réunis­sant les méde­cins des stations et des CFI*. En tire-t-il une certaine fierté ? Sans doute, mais discrète. Il recon­nait assu­mer son rôle avec un enga­ge­ment sans faille même si sa fonc­tion dévore une bonne partie de ses loisirs.

« Aider les autres »; Charles a érigé ces trois petits mots en ligne de vie qu’il assume dans son métier et au sein de la SNSM. Il prend du plai­sir à retrou­ver ses amis de la station – une tren­taine de dunkerquois – rassem­blant aussi bien des gens du monde de la mer, anciens du remorquage, du lama­nage, de la pêche, que des profes­seurs de sport. Tout comme il ne rechigne jamais à rece­voir les confi­dences des uns et des autres en bon méde­cin de famille. A-t-il besoin de cette adré­na­line compa­rable à celle déjà rencon­trée lors de ses inter­ven­tions au SAMU de Tours ? Il confirme. Mais, c’est sans doute pour tenter d’ou­blier le stress, retrou­ver une certaine séré­nité qu’il profite de ses rares moments de liberté pour partir souvent seul, parfois avec son épouse, retrou­ver Matiju IV, son semi-rigide stationné à Bray-Dunes. Prétexte à s’adon­ner à la pêche au trémail, sa favo­rite, qu’il pratique depuis qu’il est enfant. Hiver comme été, qu’il pleuve ou qu’il vente.

C’est dire que Charles n’a rien d’un contem­pla­tif. Avant de nous quit­ter, nous avons parlé de son autre passion, le brico­lage, et de son cadeau de Noël, une perceuse. Il a fallu que j’in­siste pour qu’il me raconte sa dernière inter­ven­tion, le sauve­tage d’une vedette de 20 mètres. Enfin, à l’heure de nous sépa­rer, Charles a tenu à évoquer sa parti­ci­pa­tion au sauve­tage de Jean-Pierre en panne de moteur sur son Zodiac et sauvé de justesse. « Chaque fois que nous nous rencon­trons à Bray-Dunes, Jean Pierre a les larmes aux yeux. Rien que pour ça, ça vaut le coup d’ap­par­te­nir à la SNSM » m’a-t-il confié. 

Auteur : Bernard Rubin­stein – Sauve­tage n°127

 

* La commis­sion médi­cale comprend 7 membres et traite de toutes les affaires médi­cales de la SNSM au niveau natio­nal (défi­ni­tion des critères d’ap­ti­tudes médi­cales des cano­tiers, contenu des forma­tions en secou­risme en colla­bo­ra­tion avec la direc­tion de la forma­tion, élabo­ra­tion des dota­tions médi­cales des canots avec la direc­tion des achats…).