« C’était un dimanche », se souvient Jean-Marc. Le 19 décembre 2021. À 7 h 24, quatre sauveteurs de la station de Berck-sur-Mer sont engagés par le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Gris-Nez, le centre de coordination régionale des secours en mer. On craint pour un groupe de migrants qui tente la traversée vers le Royaume-Uni sur un pneumatique de mauvaise qualité, sans doute fourni par un passeur. Une fois de plus. Ils sont près du rail, où les gros navires remontent la Manche à la queue leu leu. Contact à 8 h 32. Pas de demande d’assistance. Les sauveteurs veillent. 9 h 59. L’embarcation des migrants se dégonfle d’un coup. Pas de compartiments comme sur les bons pneumatiques. Les sauveteurs récupèrent rapidement les naufragés. Alors qu’ils devaient les confier à une vedette de gendarmerie, celle-ci est déroutée vers une autre alerte. Petit détail, le SNS 709 Jean-Baptiste Fournier, sur lequel se retrouvent vingt personnes – seize naufragés et quatre sauveteurs – est un semi-rigide (ou SR) de 7,40 mètres de long. Les sauveteurs de cette station sans port ni jetée le mettent à l’eau depuis une plage. Heureusement, le temps est maniable. Petite brise d’est. Avec ses deux moteurs de 115 ch, le vaillant petit bateau va parcourir 28 milles (plus de 50 kilomètres) en moins d’une heure et demie, à 20 nœuds, pour ramener tout le monde.
Pourquoi dit-on semi-rigide ?
On connaît les canots pneumatiques, par exemple les petites annexes de bateau : un boudin gonflé, souvent séparé en deux compartiments, une toile ou un plancher sous les pieds. Le fond des SR est une vraie coque en fibre de verre ou en aluminium, qui assure la rigidité et la glisse à grande vitesse, entourée de boudins gonflables collés qui procurent flottabilité et stabilité.
L’urgence s’imposait. Ce n’est pas une raison pour naviguer à vingt sur un SR cet été ! Ce sauvetage souligne cependant la capacité d’emport extraordinaire des SR, grâce à la stabilité que leur confèrent les boudins gonflés. De plus, on peut les déplacer sur une remorque routière et les mettre à l’eau depuis une plage ou une cale. Les plus gros peuvent même être dégonflés afin respecter la largeur autorisée sur route (2,55 m).
Les plaisanciers en sont de plus en plus friands. Il suffit de regarder autour de soi, et pas que l’été. Au salon nautique de Paris, en décembre 2021, une grande partie du hall 1 leur était consacrée.
Les sauveteurs aussi en sont devenus adeptes. Pour des stations comme Berck-sur-Mer, ils sont le moyen unique d’intervention. Pour d’autres, ils sont un deuxième moyen. Un SR peut intervenir seul quand les sauveteurs sont appelés par temps maniable pour secourir près du port. Quand il faut un navire plus important, c’est un moyen complémentaire très utile pour s’approcher de l’embarcation en détresse sans avoir à mettre à l’eau la petite annexe du canot de sauvetage et y embarquer des sauveteurs, manœuvre qui présente toujours des risques. Pour les nageurs sauveteurs des plages, il est idéal pour patrouiller le long du rivage et aider des pratiquants de loisirs nautiques en difficulté. Aujourd’hui, la flotte en possède déjà près de deux cents. La direction de la formation de la SNSM s’est adaptée et leur consacre des stages spécifiques.
Attention à la mise à l’eau
Transportables sur remorque, beaucoup de SR sont mis à l’eau pour la journée. D’où les encombrements sur les cales en pleine saison. On se dépêche, plusieurs remorques manœuvrent en même temps. Attention à l’accident ! Soyez patients et vigilants !
Nous retrouvons Jean-Marc, en février 2022 à Saint-Nazaire, au Pôle national de formation (PNF). Il a beau être patron de sa station, il a beau avoir assuré de nombreuses interventions, il ressent le besoin de consolider son expérience.
Pendant quatre journées bien remplies, ils vont être six (Bruno, Gaétan, Laurent, Marie, Jean-Marc et Romain) à bénéficier de l’expérience de deux – par moments trois – formateurs (Pascal, Philippe et Patrick). Normalement, les stagiaires sont un peu plus nombreux. Les annulations de dernière minute sont inévitables, notamment pour ceux qui travaillent. Si le responsable du stage avait panaché volontairement le groupe, il n’aurait pas fait mieux que le hasard. Les âges s’étalent de 21 à 64 ans. Quatre sauveteurs embarqués, deux nageurs sauveteurs dont une femme. De multiples provenances géographiques, des Hauts-de-France à l’Aquitaine et jusqu’en Corse. C’est important. « Un tiers de l’efficacité des stages tient aux échanges entre stagiaires », dit souvent Didier Moreau, directeur de la formation. Ils vont tout le temps échanger entre eux et avec les formateurs, y compris à chaque repas pris en commun. Pendant quatre jours, ils vont collaborer par équipages de trois pour la préparation théorique des sorties (météo, cartographie, mise à jour du livre de bord) et, surtout, pour la navigation pratique.
« En station, malgré les formations, on a rarement l’occasion de naviguer autant par toutes les conditions », dit Philippe Machefaux, un des précieux formateurs bénévoles qui viennent prêter main-forte. Premier jour, petit tour de prise en main d’une vingtaine de milles dans le clapot de l’estuaire ; deuxième jour, aller et retour à Pornic avec escale à Pornichet, divers petits pièges de navigation entre les bouées, les cailloux, les alignements, les courants. Beau temps, mer belle, mais retour de nuit entre feux et gros navires qui sortent de Nantes ou de Saint-Nazaire. Le troisième jour, grande tirée jusqu’à L’Herbaudière, Pornic, et retour avec un temps nettement plus musclé. 20 nœuds de vent, des grains, des vagues. En quatre jours, ils auront fait plus de 100 milles (185 kilomètres) à la barre, à la navigation ou comme patron. Les rôles tournent, sous l’œil attentif du formateur. Mais n’allons pas trop vite.
Tout a commencé dans une salle de cours. Chacun s’est présenté et les formateurs ont situé ce stage NavOps (navigation opérationnelle) dans le cursus de formation. Cette fois-ci, il s’agit de savoir emmener et ramener un équipage en sécurité et en confiance en sachant où on est, de jour comme de nuit, et par tous les temps. La formation complète de patron en intervention de sauvetage comprend un deuxième stage dit « opéSAR », consacré à la recherche des naufragés et à leur sauvetage (SAR étant l’acronyme de Search and Rescue). Jean-Marc s’est déjà inscrit pour revenir dans quelques semaines.
Cette fois-ci – anticipons le dénouement –, les stagiaires auront tous validé la formation, « mais ce n’est pas automatique », assure Pascal, responsable pédagogique du stage. « C’est une responsabilité. Je ne signe que si je suis sûr qu’un équipage peut se sentir en confiance avec eux », résume-t-il. Pour limiter les risques d’échec, il s’est renseigné avant, a vérifié les prérequis. Éventuellement, il a conseillé des entraînements et/ou révisions. Les stagiaires ont notamment rafraîchi leurs connaissances en cartographie et navigation grâce au e-learning.
Avant d’avoir le droit de poser leur carnet de notes ici, les candidats ont dû montrer patte blanche. Ils ont tous leur permis de navigation côtière (celui qui donne le droit de conduire un bateau à moteur de plus de 6 ch) et hauturière, ainsi que leur CRR (certificat d’aptitude à l’utilisation de la radio VHF). Bientôt, il leur faudra aussi leur premier niveau de secourisme. Les sauveteurs sont déjà nombreux à l’avoir (l’objectif étant 100 %) et cela fait partie des conditions pour que cette formation soit reconnue officiellement par l’État. La direction de la formation est, à juste titre, très fière de ces reconnaissances. Elle entend bien tout faire pour respecter les conditions. Les sauveteurs, quant à eux, sont de plus en plus acquis à la formation et à la vérification des compétences. Bruno Chantry, un des six stagiaires, qui a toute une vie professionnelle d’infirmier derrière lui, va repasser le certificat de secourisme pour revoir ses connaissances et être « dans les clous ».
Les sauveteurs révisent, répètent, s’entraînent sans arrêt. Bien qu’ils aient leur CRR, Patrick Morandeau – formateur qui a passé une partie de sa vie professionnelle de l’autre côté de la radio, au CROSS – leur rappelle ainsi la nécessité de s’exprimer vite et sans ambiguïté à la radio. Plutôt « affirmatif » et « négatif » que « oui » et « non », parce que des mots d’une seule syllabe peuvent se perdre dans une microcoupure de communication. « À vous » en fin de message pour qu’en face on puisse parler sans risquer de s’exprimer en même temps que son interlocuteur. Et si la VHF portable étanche a pris l’eau, ne pas hésiter à la secouer un peu pour être sûr de ne pas parler à travers une couche d’eau.
Très vite, les formateurs responsabilisent les deux équipages. « Les sacs du bateau, les clés, les VHF portables, les livres de bord sont posés là. À vous de jouer. » Avant de « jouer », passage obligé impressionnant pour un non-initié, un journaliste de SAUVETAGE, par exemple : s’équiper avec la « tenue sèche », qui permet de flotter au sec en cas de chute à la mer. On se sent comme le capitaine Haddock essayant son scaphandre pour aller marcher sur la Lune. D’abord, un pantalon de ciré un peu particulier, qui se prolonge par deux « chaussettes » étanches, solidaires du pantalon. Pas de bottes. L’eau peut circuler librement dans les chaussures relativement légères que l’on met par-dessus. Enfiler la vareuse pour le haut du corps n’est pas une partie de plaisir si l’on est claustrophobe. Au niveau des poignets et du cou, des joints en caoutchouc souple. Pas d’ouverture devant. La seule fermeture à glissière est celle qui va solidariser le bas avec le haut en faisant tout le tour du bassin. Si l’on ne veut pas être mouillé en passant à l’eau – ce qui arrive aux stagiaires le dernier jour ! –, ne pas oublier le joint qui complète l’étanchéité au point de départ et d’arrivée des fermetures à glissière, et qu’il faut bien, bien visser. Ce n’est pas fini : manquent le gilet de sauvetage, le casque et les gants.
Et pourtant, au bout de quelques instants, on s’habitue et on arrive à bouger relativement bien dans cette tenue souple et protectrice. Évidemment, sous le soleil d’été, dans le sud, la combinaison vire au four. Il faut trouver des solutions à base de combinaison de plongée.
Sur le gilet, une longe de sécurité. Pourtant, le formateur ne la fait pas accrocher… Autre bizarrerie, les gilets ne sont pas gonflables à déclenchement automatique. Ce sont des traditionnels en mousse, pas très épais, dont la flottabilité varie selon la taille de l’équipier. Explication : un des risques en SR à grande vitesse, par mer formée, est le retournement. Il faut qu’un équipier coincé sous la coque puisse se dégager rapidement. D’où la flottabilité réduite des gilets car les combinaisons sèches assurent déjà une certaine flottabilité. Avantage supplémentaire, la mousse protège contre les chocs.
Non sanglé, on peut donc être éjecté. Même le barreur, qui doit toujours avoir son coupe-circuit au poignet. Avant même de sortir du bassin, on révise la manœuvre d’homme à la mer. Dès qu’il est tombé, un équipier ne le perd pas des yeux. Quelques vagues, même petites, ont vite fait de cacher une tête à la dérive. Le navigateur appuie sur la touche MOB (man overboard) de l’électronique pour pouvoir retrouver le lieu de la chute. Et le barreur fait très attention au sens dans lequel il tourne. Il ne faut pas qu’en virant, il rapproche les hélices de la personne à l’eau. Et après ? Une fois l’homme à la mer retrouvé ou, pire, une fois tout l’équipage passé à l’eau, bateau retourné, il faut remonter à bord. L’airbag sur le portique de sécurité a remis le semi-rigide de sauvetage retourné dans le bon sens. Même si un SR a l’air d’un gros engin de plage, on ne remonte pas facilement à bord. Aucun des six stagiaires n’a réussi par ses propres moyens. Pascal, ancien militaire très entraîné, y arrive en se donnant de l’élan grâce à la flottabilité du gilet. Il se laisse plonger et il rebondit. Petite astuce : avoir un morceau de bout dans la poche qui, habilement noué sur les saisines qui font le tour, permet de bricoler une marche dans laquelle on peut mettre un pied et se hisser. En plaisance, avoir une échelle, bien sûr. Quand une victime est à l’eau, éventuellement blessée ou inconsciente, les sauveteurs disposent d’un matériel particulier, notamment les filets Markus sur lesquels on peut glisser une personne allongée le long du bord, puis la hisser dans l’embarcation.
Nous voici donc harnachés, à bord. Première prise en main dans le bassin. Elle rappelle notamment aux barreurs qu’un SR est relativement léger et plat sur l’eau. Le vent le fait facilement déraper au mauvais moment, juste quand on essaye d’aborder le ponton, par exemple. Les alvéoles de l’ancienne base de sous-marin allemande ont le mérite d’abriter la petite flotte du PNF. Mais elles canalisent le vent, qui passe au travers.
Indispensable échelle
Tous les gros SR récents disposent d’une échelle. Elle peut servir pour la baignade, mais c’est surtout un dispositif de sécurité obligatoire. Montrez bien à vos équipiers et invités où elle est. Si votre SR, plus ancien, n’en dispose pas d’origine, ajoutez-en une d’urgence ! La plupart des personnes sont incapables de remonter seules sur un gros pneumatique sans échelle.
Les affaires sérieuses commencent après l’écluse. De loin, les petites vagues levées par le vent et le courant sur l’estuaire de la Loire n’ont pas l’air méchantes. De près, l’invité non entraîné se sent comme dans une attraction de fête foraine qui fait tout pour le secouer, lui tasser les vertèbres, voire l’éjecter, comme au rodéo. Ça va vite, mais qu’est-ce que ça tape ! Les sauveteurs barrent debout, les fesses juste calées sur un coussin, et les équipiers restent également debout, bien accrochés aux nombreuses mains courantes. On encaisse avec les jambes. Personne n’est assis sur les boudins. On peut s’asseoir un peu tout à l’arrière, près des moteurs. Sur les semi-rigides les plus confortables, notamment le gros NSC2 de la nouvelle flotte, l’équipage dispose de selles, qui amortissent les chocs.
Pascal a un message qui vaut pour tous, même en plaisance : « C’est toi, le barreur, qui as la position la plus confortable. Garde en tête que c’est plus dur pour les autres. » Puis il prend un peu la barre pour montrer comment on peut passer mieux et plus vite en jouant sur le trim (voir plus loin), la manette des gaz et l’adaptation de la conduite à la fréquence de la houle (distance entre deux crêtes) et à sa direction. Pour les sauveteurs, il est parfois capital de passer vite. Les autres peuvent ralentir. Mais les sauveteurs doivent aussi ménager l’équipage si l’on veut qu’il reste efficace. Le premier soir, à table, les jeunes sont autant vidés que les vieux.
Bien passer dans la mer formée, c’est un peu de théorie – une bonne partie de la deuxième matinée – et beaucoup de pratique. « Il faut sentir son bateau », répète Pascal en fléchissant les jambes comme s’il était à bord.
On peut résumer le problème en deux images. Les belles photos de SR décollant sur une vague ou plantant le nez en soulevant de superbes gerbes d’écume sont des illustrations de bateaux mal barrés. Il faut, au contraire, empêcher l’embarcation arrivant au sommet d’une vague de lever le nez pour éviter que le vent prenne dessous. En descendant la vague, ne pas planter le nez dans la suivante pour éviter de culbuter cul par-dessus tête et/ou d’embarquer beaucoup d’eau par l’avant et/ou de se mettre en travers et d’être roulé.
Deux outils : le trim, inclinaison du moteur par rapport à la verticale, et la manette des gaz, permettant d’accélérer ou de ralentir.
En trim positif, le moteur est incliné vers l’avant, l’hélice pousse vers le bas et fait lever le nez du bateau. Le trim négatif donne les effets inverses. Chaque bateau ayant une répartition des poids différente. Par mer plate, il faut trouver la position neutre du trim, barre souple.
S’il y a de la mer et qu’on l’affronte de l’avant, trim négatif pour baisser le nez. Si la mer vient de l’arrière, il faut surtout éviter « l’arrêt buffet » du bateau, qui plante brutalement. Trim positif.
En plus, le pilote doit avoir la main sur la manette des gaz non pas pour modifier la vitesse mais pour jouer, tout en légèreté, sur des coups d’accélération et de décélération. Décélération quand on approche le sommet de la vague pour baisser le nez, accélération une fois la crête passée pour lever le nez dans le creux. Et si la mer est un peu ou totalement de travers ? On bricole. On fait des lacets, on tire des bords en tenant compte de ce qui a été dit précédemment.
Dans la durée, le barreur finit par avoir le bras ankylosé et son attention diminue. Une des responsabilités du patron est de s’en rendre compte et de le faire relayer par un nouveau barreur.
Il y a beaucoup de technique dans ces stages ; mais, finalement, la principale difficulté pour ceux qui n’en ont pas du tout l’expérience est de tenir le rôle de patron. On entend beaucoup d’autocritiques : « Je n’ai pas assez parlé, pas assez expliqué, j’aurais dû vérifier le cap donné par le navigateur… » Briefer, débriefer, garder du recul, expliquer et rassurer plutôt que de se disputer avec tout le monde. Facile à dire, pas toujours facile à faire, sur un SR comme au travail.
Savoir-vivre en semi rigide
Île de Groix, été 2021. À Port-Tudy, le ponton pour les annexes indispensable aux plaisanciers amarrés sur bouées pour débarquer est colonisé par quelques énormes SR. De l’autre côté de l’île, au fond du spectaculaire mouillage de Port Saint-Nicolas, se trouvent deux minuscules plages. Deux SR tirés sur le sable et… il n’y a plus de plage. Bien que leur allure générale les fasse ressembler à une annexe de bateau, des semi-rigides de 5, 6 ou 7 mètres ne sont pas des annexes. Ce sont des bateaux. Ayez la courtoisie d’en tenir compte.
Entretien rime avec sécurité
Petite visite à Thomas Colin, qui veille sur l’entretien des bateaux du Pôle national de formation de la SNSM. Quelques conseils :
- Vérifiez souvent, idéalement à chaque sortie, le gonflage à la bonne pression de votre SR. La rigidité de l’ensemble et sa bonne tenue à la mer en dépendent. Un choc ou une pression forte ont pu déclencher les valves de surpression. Normalement, cela s’entend.
- Nettoyez en douceur. Les boudins sont recouverts d’une couche protectrice qui peut être endommagée par des produits d’entretien et des éponges grattantes. « Contentez-vous de l’eau », recommande Thomas.
- En cas de crevaison, la séparation en cinq ou six compartiments permet de rester à flot et de rentrer doucement. Certaines coques « moussées » ajoutent de la flottabilité. « Si vous êtes nombreux, faites rentrer une partie de l’équipage par d’autres moyens », suggère Thomas.
- Côté carburant, vérifiez évidemment que vous en avez assez. Les sauveteurs sont un peu las d’aller chercher des plaisanciers en panne. Des réservoirs atteignant et dépassant souvent les 100 litres sont des bombes en puissance. Les feux sont rares, mais graves. Avant chaque départ des sauveteurs, le patron rappelle où sont les vannes d’arrêt de l’essence et les extincteurs. « Il faut réagir très vite en cas de feu », souligne Thomas. Si on n’arrive pas à le maîtriser, il faut faire sauter tout le monde à l’eau (avec des gilets et en ayant prévenu les secours) avant que les réservoirs n’explosent.
- Ces embarcations comportent souvent des cales ou compartiments sous le pontage. Vérifiez que tout est propre et qu’il n’y a pas de carburant qui suinte, surtout à proximité d’un équipement électrique ! À l’achat, vérifiez si tuyaux et câbles semblent convenablement montés, séparés et identifiés. Le montage a pu être fait chez un concessionnaire peu expérimenté.
- On ne démarre pas un hors-bord de 100 ch à la main. Ayez un voltmètre au tableau de bord et vérifiez qu’il atteint les 14V environ quand le moteur tourne. Séparez bien les batteries de servitude (instruments, réfrigérateur, etc.) de la précieuse batterie moteur réservée au démarrage.
Mouillage, amarrage, remorquage
Le point d’amarrage le plus solide est le piton dans l’étrave qui sert à sortir le bateau de l’eau. Avant de naviguer, fixez-y un cordage solide de 2 à 4 m, qui peut s’avérer pratique en cas de remorquage. Pour mouiller à l’ancre en sécurité, il faut de la chaîne pour donner du poids au mouillage et l’empêcher de s’abîmer sur les rochers, ainsi que trois fois la hauteur d’eau (à marée haute) en longueur. Sinon, risque de dérapage garanti pour peu qu’il y ait un peu de vent. Les sauveteurs emportent en plus une ancre flottante, qui peut leur servir à limiter la dérive s’ils ont besoin de s’arrêter ou sont en panne.
Cartographie
Les SR des sauveteurs sont équipés de superbes traceurs de route. Néanmoins, ils ne sortent jamais sans une carte papier sous couverture plastique. Elle permet d’avoir une vue plus générale et de se repérer par des moyens classiques (relèvements, par exemple) si l’électronique a un problème. Les formations comportent des pannes simulées. Les stagiaires partent aussi avec de petites tablettes de plongée en plastique sur lesquelles ils notent les grands points de repère de la zone (bouées, phares, pointes, rochers) pour pouvoir se recaler rapidement. On voit de plus en plus de radars sur les gros SR dotés de portiques arrière, sur lesquels on peut installer l’antenne. Conseil de Philippe, patron à La Rochelle : « Le radar peut être très utile à condition que vous l’ayez essayé plusieurs fois par beau temps et bonne visibilité pour apprendre à le régler et à repérer les éléments bien repérables de votre zone de navigation. »
Ouvrez les vide-vite au départ
Si vous risquez d’avoir à naviguer par mer formée, pensez à vérifier que les trappes d’évacuation d’eau sont bien en position ouverte sur l’arrière. Si vous embarquez un paquet de mer, il faut s’en débarrasser le plus vite possible. Accélérez pour cabrer le bateau et faire partir la masse d’eau vers l’arrière.
Article rédigé par Jean-Claude Hazera, diffusé dans le magazine Sauvetage n°160 (2ème trimestre 2022)