Jusqu’au XIXe siècle, les naufrages étaient souvent une réalité tragique. On déplorait l’absence de moyens techniques. En outre, les rares canots de sauvetage1 s’avéraient disparates et difficiles à armer, car les marins qui auraient pu embarquer et intervenir se trouvaient généralement en mer au moment de l’alerte. Qui plus est, le manque de budget ne permettait pas de se doter de canots autoredressables ni de mettre en place une organisation de sauvetage efficace.
Les années 1820 sont marquées par de violentes et récurrentes tempêtes, qui ravagent les côtes européennes. On dénombre, à l’époque, plus de mille huit cents naufrages par an au Royaume-Uni. Trop pour Sir William Hillary, un baronnet de l’île de Man, en mer d’Irlande. Il conçoit un projet d’implantation de vrais canots de sauvetage, avec des équipages formés le long des côtes du Royaume-Uni et de l’Irlande, qu’il adresse en 1823 à la Royal Navy, aux ministres et aux parlementaires.
L’amirauté refuse de l’aider dans son initiative. Tenace, Hillary lance un nouvel appel aux philanthropes de la société londonienne et convainc plusieurs parlementaires. Et – comme de nombreuses grandes idées au Royaume-Uni – c’est dans la célèbre London Tavern de Bishopsgate que son projet d’organisation du sauvetage se concrétise par la fondation de la National Institution for the Preservation of Life from Shipwreck, le 4 mars 1824. Preuve que la question occupe à l’époque : la réunion est présidée par l’archevêque de Canterbury, Charles Manners-Sutton, en personne. Placée sous la protection du roi George IV, la société prendra le nom de Royal national lifeboat institution (RNLI) quelques années après.
Au Pays-Bas, des canots de sauvetage après les tempêtes
Ce mouvement n’a pas lieu qu’outre-Manche. Les tempêtes déferlent aussi sur les Pays-Bas. Dans la seule journée du 14 octobre 1824, dix-sept navires coulent au large de la côte néerlandaise. Cet événement convainc Barend van Spreekens, homme d’affaires habitant Amsterdam, de lancer une collecte de fonds moins d’un mois plus tard pour acheter des canots de sauvetage. Il crée la Noord-en Zuid-Hollandsche Redding-Maatschappij, avec pour zone d’action les eaux au nord de Scheveningen.
Le 20 novembre de la même année, Willem van Houten, marchand de Rotterdam, fonde la Zuid-Hollandsche Maatschappij tot Redding van Schipbreukelingen. La zone d’action s’étend au sud de Loosduinen et comprend les Flandres. Il faudra cependant attendre 1991 pour que soit établie la Koninklijke Nederlandse Redding Maatschappij (KNRM), issue de la fusion des autres sociétés.
En France aussi, le sauvetage en mer s’organise. La première station verra le jour à Boulogne-sur-Mer en 1825… pour porter secours aux baigneurs ! Une histoire que SAUVETAGE vous racontera à l’occasion des deux cents ans de la station l’année prochaine.
*1: Dés 1785, Lionel Lukin s’était lancé dans la construction d’un prototype de canot de sauvetage insubmersible . Celui ci sera perfectionné en 1790 par Henry Greathead et confirmé comme le premier vrai canot de sauvetage.