Réformés, les vieux canots de la SNSM partent rarement à la casse. Une seconde vie les attend souvent : dans les secours en mer à l’étranger, une association patrimoniale ou, plus rarement, dans les mains généreuses d’un particulier. « J’ai racheté, témoigne cet homme, fier mais anonyme, le SNS 066 Bailli de Suffren II. » Une première façon de soutenir la SNSM, dont le budget dépend grandement de la générosité du public. « Puis j’ai donné ses deux moteurs au Pôle de soutien de la flotte de la SNSM. » Second coup de pouce du même particulier, bien… particulier. En quoi ?
L’histoire commence voilà un demi-siècle. « Gamin, en séjour à Saint-Tropez, je n’avais d’yeux que pour le canot des sauveteurs. » L’enfant émerveillé deviendra collectionneur de bateaux réformés. Son dernier : une vedette des douanes. Se partageant entre Paris et Saint-Tropez, notre homme apprend que le canot tropézien doit être remplacé par un navire de nouvelle génération : le SNS 004 Bailli de Suffren III, 19 m, sorti des chantiers Sibiril de Carantec. S’impose alors l’idée de le racheter. « Ça a pris du temps mais, en janvier dernier, la transaction était réglée. Le SNS 066 part aux ateliers pour une restauration minutieuse, dont le remplacement des moteurs », car le propriétaire entend répondre aux normes IMO Tier III actuelles et futures.
À Paris, au siège de la SNSM, Baptiste Fantin, directeur des services techniques, a un problème : le moteur bâbord du SNS 063 CV L’Herminier II, de la station de Bonifacio, rend l’âme, après trente-et-un ans de service. Vu la forte activité de la station (cinquante-cinq sorties et cent treize personnes secourues en 2020), il faut le remplacer en attendant l’arrivée du nouveau canot, prévue en 2024. La facture s’élève à 120 000 €. Un souci majeur s’ajoute : ce type de moteur n’est plus disponible ! Baptiste pense alors à une solution : l’acheteur du Bailli accepterait-il de céder à L’Herminier II les moteurs qu’il remplace ? La facture tomberait alors à 32 000 €.
Un généreux donateur
« Il m’a joint, raconte notre donateur. J’ai alors contacté une dame de la station, qui m’a convaincu. » En moins d’une heure, l’affaire est conclue1. C’est ainsi qu’au printemps dernier, l’ex-SNS 066 et le SNS 063 se retrouvent aux chantiers de Saint-Mandrier, près de Toulon, pour une greffe de l’un à l’autre. « Un énorme merci au donateur », conclut Marc Dominique Tramoni, président de la station de Bonifacio. « Grâce à lui, notre canot est de nouveau opérationnel. Et nous n’avons plus à craindre un incident mécanique. »
1 – Un moteur et ses périphériques iront à L’Herminier et l’autre sera remis au Pôle de soutien de la flotte SNSM, à Saint-Malo
Article rédigé par Patrick Moreau, diffusé dans le magazine Sauvetage n°157 (3e trimestre 2021)