Sauvetage historique : sauvés de "la Mauvaise"

Décembre 1968. Le canot Capi­taine de Corvette Cogniet de la station de sauve­tage Port Bloc (33), sauve onze équi­piers du Liberty ship Azuero échoué sur le banc de La Mauvaise dans l’es­tuaire de la Gironde.

Mardi 24 décembre, par mer grosse, le Liberty ship panaméen Azuero (135 m), fait route de Recife vers Bordeaux avec sa cargai­son de sucre. Vers 10 heures, suite à une avarie de machine, le cargo talonne sur le banc de la Mauvaise, à l’en­trée de la Gironde, l’une des zones les plus acci­den­to­gènes de la côte atlan­tique. Le cargo lance un SOS, immé­dia­te­ment reçu par la station de Port-Bloc. À 10h30, le Capi­taine de Corvette Cogniet, qui a pour patron Jean Bosser, appa­reille et arrive sur zone peu avant midi.

Il ne peut accos­ter l’Azuero à cause des brisants, mais quarante minutes plus tard, ce dernier met une embar­ca­tion à la mer. Cette balei­nière, pleine d’eau, amène 11 hommes d’équi­page au canot de sauve­tage qui les recueille. Tran­sis de froid, les naufra­gés sont aussi­tôt réchauf­fés et récon­for­tés.

Un héli­co­ptère de la Gendar­me­rie évacue de son côté 19 équi­piers en plusieurs rota­tions. Le canot de la SNSM demeure sur zone malgré une mer défer­lante  pour appor­ter une aide éven­tuelle au cargo. Lorsque l’Azuero se casse en deux, son capi­taine accepte enfin d’être évacué. À 16h10, le canot de sauve­tage des Sauve­teurs en Mer Capi­taine de Corvette Cogniet débarque ses 11 naufra­gés à Royan, puis s’amarre à Port-Bloc à 17h. Mission accom­plie.

Le capi­taine de l’Azuero décla­rera à Bordeaux : « Je tiens à trans­mettre un grand merci à tous ceux qui nous ont aidés et assis­tés. En parti­cu­lier, je voudrais adres­ser ces remer­cie­ments aux hommes du canot de sauve­tage qui, spon­ta­né­ment et béné­vo­le­ment, ont risqué leur vie pour venir sauver les nôtres. »

La station de Port-Bloc, rebap­ti­sée en 2005 station de Port-Médoc, créée en 1953 par la Société Centrale de Sauve­tage des Naufra­gés, ancêtre de la SNSM

 

D’après un article de Patrice Brault, paru dans le Maga­zine Sauve­tage n° 139 (1er trimestre 2017).

 

Pour aller plus loin…

Le terme « Liberty ship » désigne les quelque 2 710 cargos construits aux États-Unis au cours de la Seconde Guerre mondiale. Ces cargos étaient desti­nés à affir­mer la volonté des États-Unis d’être l’ar­se­nal du monde libre à aider la Grande-Bretagne à finan­cer les acqui­si­tions.

Le Capi­taine de Corvette Cogniet est un canot tous temps de 1ère classe, en bois, de 14,35 m, construit en 1952 par les Chan­tiers navals de Norman­die – Lemaistre à Fécamp. Il est équipé de deux moteurs diesel Baudoin de 55 CV. Il sert pendant 18 ans à Port-Bloc puis est affecté à l’Aber­wrac’h. Là, le 7 août 1986, il se fracasse sur les rochers en allant porter secours à un bateau de plai­sance de Morlaix, causant la mort des cinq membres d’équi­page.

La station de Port-Bloc, rebap­ti­sée en 2005 station de Port-Médoc, a été créée en 1953 par la Société Centrale de Sauve­tage des Naufra­gés, ancêtre de la SNSM. Avant sa créa­tion, le sauve­tage était assuré depuis 1876 dans l’es­tuaire de la Gironde par des remorqueurs ou des chalu­tiers à vapeur au sein d’une station dite de l’Em­bou­chure de la Gironde. La station SNSM de Port-Médoc dispose aujour­d’hui d’un canot tous temps de 17,6 m, le SNS 085 Made­leine Dassault. Il a été construit par le Chan­tier Bernard à Locmiqué­lic en 1995 et moder­nisé en 2013. Il est équipé de deux moteurs diesel Iveco de 380 cv chacun.

Les cano­tiers enga­gés sur le Capi­taine de Corvette Cogniet :

Jean Bosser, patron,
François Jaffry, sous-patron,
Vuk, méca­ni­cien,
Loyseau, radio,
Marc Blanc, Lucien Garaud, Gloa­guen, Claude Oliveau et Yves Poineau, cano­tiers.