Le matelotage, un art marin qui se perd

Le mate­lo­tage repose sur un savoir-faire tradi­tion­nel très ancien. Ce n’est pas unique­ment l’art des nœuds et des épis­sures, mais tout ce qui concerne l’en­tre­tien d’un navire, de son grée­ment, de ses embar­ca­tions, toutes les manœuvres de la voilure, de prise de mouillage, d’ar­ri­mage de la cargai­son, de remorquage et d’ac­cos­tage.

Aujour­d’hui, l’ap­pren­tis­sage des tech­niques de mate­lo­tage, inculqué dans diverses écoles d’en­sei­gne­ment mari­time, devient de plus en plus réduit. Pour navi­guer, il n’est plus néces­saire de connaître beau­coup de nœuds marins. Mais il faut être capable de les réali­ser et les dénouer très vite, en situa­tions urgentes, parfois dans l’obs­cu­rité. C’était le travail des fameux gabiers d’an­tan, marins spécia­li­sés dans la manœuvre des voiles, agiles à grim­per dans les mâtures avec les mate­lots – même par gros temps, – prendre des ris*, chan­ger les voiles, les recoudre au besoin et s’oc­cu­per de toutes les manœuvres de pont. Que devient ce savoir-faire tradi­tion­nel au langage riche et précis, avec des expres­sions inso­lites et savou­reuses dont ils avaient le secret ? Cet article a voca­tion à vous donner un aperçu de ce savoir et éviter qu’il ne dispa­raisse.

Quelques nœuds de base,

Extraits du Surrey Six, une épreuve de rapi­dité propo­sée par la Surrey Branch de l’IGKT
(La Guilde Inter­na­tio­nale des Noueurs). Plus d’in­for­ma­tions sur : www.surreyk­nots.org.uk*

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Le nœud en huit appar­tient à la famille des nœuds d’ar­rêt; Le nœud d’écoute est un nœud d’ajut qui rallonge un cordage en ajou­tant un deuxième. Il permet donc d’abou­ter (assu­rer une liai­son entre deux cordages parfois de natures diffé­rentes); Le nœud de chaise est le plus connu des nœuds dits à boucle fixe. Le terme anglais bowline évoque le nœud d’at­tache de la bouli­ne** sur la bordure d’une voile pour l’orien­ter au plus près du vent sur les grands voiliers d’au­tre­fois. ©SNSM
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Le nœud constric­teur fait partie de la famille des nœuds de liure ou d’at­tache. Il sert à amar­rer et à bien serrer ensemble divers objets. Très commode pour prépa­rer un œil épis­sé*** sur un cordage; Ce nœud à bosser est un amar­rage à fouet sur un point fixe. Il a pour fonc­tion de main­te­nir provi­soi­re­ment une amarre en tension, avant d’ache­ver l’amar­rage final, sur une double bitte**** par exemple. ©SNSM
Ce nœud d’amar­rage avec un tour mort et deux demi-clefs se classe en tête dans sa caté­go­rie d’amar­rage. Même sous très forte tension, il pourra toujours être largué. ©SNSM

Certains sauve­teurs SNSM ont rejoint la branche française de cette guilde : www.igkt.fr. Elle soutient et offre à titre gracieux à quelques stations SNSM des petits objet déco­ra­tifs : porte-clefs en pomme de touline, brace­lets divers… lors de démons­tra­tions dans des fêtes nautiques. 

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L’art du nœud constric­teur en six étapes ©snsm

Glos­saire

* Ris : Bouts de garcette (petit cordage tressé ou toronné) desti­nés à réduire une voilure. Plusieurs bandes de ris servent à dimi­nuer progres­si­ve­ment la surface d’une voilure.

** Une bouline : filin dont une extré­mité est amar­rée sur un œil ou une patte sur les ralin­gues******* de chute d’une voie pour l’orien­ter.

*** Épissé : se dit d’un cordage sur lequel on a fait une épis­sure (entre­la­ce­ment des torons), soit pour le joindre à un autre, soit sur lui-même pour faire une boucle.

**** Une bitte : pièce en bois ou en métal fixée sur le pont d’un navire ou sur un quai, sur lequel on passe une amarre ou tout simple­ment pour tour­ner une manœuvre.

***** Courant : partie libre du cordage à partir de laquelle un nouage est réalisé.

****** Dormant : partie fixe du cordage.

******* Une ralingue : cordage qui vient renfor­cer la bordure d’une voile et sur laquelle on peut exer­cer des efforts impor­tants pour l’orien­ter. 


L’ap­pren­tis­sage à tout âge

Que ce soit à des fins profes­sion­nelles ou pour la pratique de certains sports, il n’y a pas d’âge pour décou­vrir les nouages et comprendre leurs
parti­cu­la­ri­tés. Il faut les pratiquer avec des bouts de diffé­rentes tailles. Même si, aujour­d’hui, il existe d’ex­cel­lents ouvrages, l’idéal reste la démons­tra­tion par quelqu’un qui les connaît bien et de les refaire à partir d’un modèle confec­tionné sur un tableau. Certains se conten­te­ront d’un schéma visuel, d’autres auront besoin de commen­taires, pas à pas, des diffé­rentes étapes à suivre. À chacun sa manière de les mémo­ri­ser et de les utili­ser, puis de progres­ser par la suite vers des montages plus savants.

Atten­tion, c’est un loisir qui peut se révé­ler très addic­tif !


Article rédigé par Antoine Leroy dans le maga­zine Sauve­tage n°155 (1er trimestre 2021)

Erra­tum

Une fâcheuse erreur s’est produite lors de la repro­duc­tion d’un schéma de nœud d’écoute, mal vecto­risé lors de la mise en page. Sans doute, les marins et les lecteurs initiés auront recti­fié d’eux-mêmes ; quoi qu’il en soit, une correc­tion s’im­po­sait. La voici ci-dessous, avec toutes nos excuses.

Noeud corrigé